29.9.06

Grâce au revenu garanti, Iracy ne se sacrifie plus pour sa famille

Dans les hauteurs de Lençois, une bourgade paisible de 9 000 âmes, située au fin fond de la région Nordeste – le plus pauvre du Brésil –, de petites maisons colorées fleurissent dans un océan de verdure. Dans l’une d’elles, Iracy Britto Almeida Paiva s’occupe seule de son petit-fils Patrick, 4 ans. Depuis six mois, la grand-mère de 53 ans reçoit une bourse familiale de 80 reals (32 euros) qui la soulage dans sa vie quotidienne : « Avant, j’avais des difficultés pour payer mes factures et acheter à manger. De temps en temps, je me privais pour mes enfants et petits-enfants. Mais aujourd’hui, avec la bourse familiale, c’est fini : je ne suis plus au centime près quand je fais mes courses. Pour moi et Patrick, l’horizon se dégage. »
La famille Almeida Paiva ne vit pas sur l’or pour autant : dans leur maison, vous ne trouvez ni téléphone, ni livres, ni appareils électroménagers. L’unique objet de valeur de la maison d’Iracy est une vieille télé couleurs qui trône au milieu du salon. Pour les loisirs, le budget familial est pratiquement nul. Pour se détendre, Iracy va de temps en temps à la plage ou regarde des novelas sur TV Globo. Mais ce sont surtout les visites régulières des amis et voisins qui égaient ses journées. « On compense notre absence de biens matériels par des relations accrues avec notre entourage. Il est impossible de sentir seul ici. Dans les moments difficiles, l’entourage nous pousse à aller de l’avant. », explique la mère de six enfants, tous âgés de plus de 22 ans.
Iracy reconnaît au président Lula le mérite de vouloir endiguer la pauvreté même si elle trouve le montant de la bourse trop bas. « La bolsa familia est davantage une allocation de complément qu’un véritable revenu. Mais avec cet argent, je sais où je vais, je me pose moins de questions : en fait, c’est autant une aide financière que psychologique », plaisante l’ancienne couturière.
A Lençois, près de 1 060 familles vivent dans des conditions similaires à celle d’Iracy et touchent un revenu garanti. D’après Cassia Alves, assistante sociale chargée du programme Bolsa Familia à la mairie de la ville, « la misère disparaît à l’œil nu dans les quartiers les plus défavorisés. Les gens souffrent moins de la faim, ils reprennent confiance en eux, prennent des initiatives. Vous n’entendrez personne ici dire que la bourse est une hérésie politique. » Malgré le succès de la bourse familiale, le devoir de solidarité doit continuer avec les familles modestes du Brésil. L’éradication de la famine et des maladies de la pauvreté est à ce prix.

Samuel Duhamel

Pour en savoir plus :
Livres :
- L’allocation universelle, de Yannick Vanderborght et Philippe Van Parijs, éd. La découverte
- Le revenu d’existence ou la métamorphose de l’être social, de Yoland Bresson, éd. L’esprit frappeur
- L’allocation universelle. Pour un revenu de citoyenneté, de Jean-Marc Ferry, éd. Cef
- Renda básica de cidadania : a resposta dada pelo vento, de Eduardo Suplicy, éd. LPM Pocket
- Bolsa Familia, de Marco Weissheimer, éd. Fundação Perseu Abramo

Sur la toile :
- Basic Income Earth Network : http://www.basicincome.org/
- Libérer l’avenir avec le revenu d’existence : http://chezsamuca.blogspot.com/2006/03/librer-lavenir.html