29.9.06

Une allocation universelle pour en finir avec la misère extrême

« Les conditions de vie se détériorent, les inégalités sociales s’accentuent, l’environnement se dégrade mais je reste persuadé qu’une civilisation du bonheur est possible.»
René Dumont

Sur la Terre aujourd’hui, trois milliards d’individus reçoivent 1,2 % du revenu global alors qu’un milliard d’habitants en reçoit 80%[1]. En 2005, les 500 personnes les plus riches concentraient autant de richesses que les 420 millions les plus pauvres[2]. La vérité des chiffres est cristalline mais de tels déséquilibres finissent par aveugler. Pourtant, jamais les écarts de revenus entre les serviteurs du capitalisme financier et les sans-grades des pays du Sud n’ont été aussi importants. Pour inverser cette tendance inégalitaire, des économistes (dont les Prix Nobel Jan Tinbergen, James Meade et James Tobin), des écologistes (André Gorz, Alain Lipietz, Yves Cochet…) et un mouvement social hétéroclite allant des communistes révolutionnaires aux catholiques conservateurs défendent l’instauration d’une allocation universelle. Egalement appelée revenu d’existence ou dividende social, l’allocation universelle a pour principe de ne laisser aucun individu sans ressources suffisantes pour se nourrir, se vêtir et se loger. Contrairement au Revenu minimum d’insertion, elle est accordée à tous les citoyens, de manière individuelle et sans contrepartie de recherche d’emploi.
Ses avantages sont innombrables : écologique, elle freine la croissance de la production industrielle et privilégie le « mieux-être » au « plus avoir ». Sociale, elle permet de s’attaquer à la grande pauvreté et libère l’individu de la crainte d’être exclu. Economique, elle allège le coût du travail et incite certains urbains à retourner à la campagne où la vie est globalement moins chère. Loin d’être utopique, l’allocation universelle peut être financée par une taxation accrue des activités polluantes, des combustibles fossiles, des transactions immobilières et financières et de la publicité. Pour le moment, seul le Brésil a osé franchir le pas en instaurant la bolsa familia (bourse familiale) en octobre 2003 puis en votant une loi instaurant la renda básica de cidadania (ou rente minimale de citoyenneté) en janvier 2004 [voir ci-dessous]. Mais d’autres pays comme l’Afrique du Sud, les Pays-Bas ou certains Etats fédérés américains prévoient de la mettre en place à plus ou moins long terme. A une époque où les budgets consacrés aux programmes sociaux se réduisent toujours davantage, voir l’allocation universelle s’immiscer dans le débat politique est porteur d’espoir. Gageons qu’il ne soit pas déçu.

Samuel Duhamel


[1] Rapport de l’Unesco (Organisation des Nations Unis pour l’éducation, la science et le culture), Lutter contre la pauvreté, 2005
[2] Rapport mondial sur le développement du PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement), 2005